dimanche 13 décembre 2015

Escale à Tarrafal de Santiago , détour imprévu dans l'univers des émigrés Cap Verdiens

Après une navigation calme d'une vingtaine d'heures au départ de Sal , nous arrivons à Tarrafal de Santiago le 8 décembre au petit jour . Quelques vieux voiliers en piteux état stationnent au mouillage . Nous discernons une agitation intense sur la plage et autour du petit môle en maçonnerie très délabrée, faisant office de brise lame . De nombreuses barques de pêche sont tirées sur la plage au fond de la baie .
Le mouillage vu de la plage

 
Les barques des pêcheurs tirées sur la plage

Le paysage alentour est très minéral ; toutefois, comme les précipitations ont été abondantes cette année, le bas de la falaise est occupée par des buissons d'accacias très verdoyants . Tarrafal de Santiago est un bout du monde paisible où l'on commence à sentir vraiment  les effets de l'ouverture sur le monde . Le processus s'est brutalement accéléré depuis l'installation d'équipements téléphoniques très performants dans les années 2000 et le goudronnage de la route   centrale dans l'île reliant à la capitale Praya il y a 4 ans reléguant au rang d'antiquités les 4x4 Hilux poussiéreux .... la nouvelle tendance en ville - pour ceux qui en ont les moyens - est de pouvoir rouler en BMW ou en 508 Peugeot .....
Nous avons la chance de rencontrer Antonio qui discute avec ses copains d'enfance  sur la place principale  . Retraité depuis 4 ans , avec son épouse -comme lui - originaire de Tarrafal,  ils partagent leur temps entre Meulin - Sénard et Tarrafal de Santiago . Antonio a travaillé 44 ans en France : 24 chez Good-Year à Amiens - du temps ou  l'on y fabriquait des produits industriels - le reste  en région parisienne à faire du gardiennage . Nous prenons le temps de faire connaissance en prenant un café . Antonio nous explique son village ; nous convenons de nous revoir l'après midi . 

Ce faisant, nous lui demandons conseil pour trouver une solution à l'impossibilité de louer une voiture sur place chez le loueur Graciosa  et notre embarras car nous devons aller chercher notre ami Xavier à l'aéroport de Praya - à l'autre bout de l'île - dans la nuit du 11 décembre : Très gentiment Antonio nous propose de nous y emmener au beau milieu de la nuit .


Antonio et son épouse nous font l'amitié devenir déjeuner à bord  .

En attendant, nous retournons le lendemain après midi rendre visite à Antonio  . Nous rencontrons son cousin Thomas arrivant tout juste de France où ils vivent 6 mois par an  . Ils ne sont pas encore passés chez eux ! Nous les accompagnons visiter leur maison située tout au centre du village , puis nous nous rendons en voiture à leur "petite ferme" qui est à  3 kms de la sortie de Tarrafal . Ils nous montrent  avec fierté, leurs volailles, la vache, les plantations de canne à sucre, de manioc, de carottes ...... Propriétaire du terrain , Thomas paie un journalier pour faire les travaux agricoles : la plantation d'une raie de canne à sucre d'environ 25 mètres de long lui coûte 100 escudos (0,90€) .
Thomas, son épouse , la femme d'Antonio nous font visiter la petite ferme . L'eau est précieuse : le système d'irrigation par goutte à goutte est ouvert deux fois par semaine seulement .
 
Thomas et sa femme sont des gens très  travailleurs . Ils sont originaires d'un village très pauvre dans la montagne qui à ce jour n'est pas encore relié par une route . Depuis leur installation en France dans les années 70, Thomas et sa femme sont revenus chaque année  à Tarrafal .
 
Chaque année ,Thomas a passé ses congés à construire des maisons à Tarrafal pour sortir de son état de pauvreté .   Il nous montre ces bâtiments non sans une quelconque fierté . Nous avons eu avec Thomas un très enrichissant échange sur le statut de l'émigré Cap Verdien : En réalité, il n'est plus nulle part chez lui : ici au Cap Vert, c'est un privilégié nanti, regardé comme une "vache à lait", et en France il appartient au bas de l'échelle sociale : situation totalement  schizophrénique . Leurs enfants et plus encore leurs petits enfants n'ont d'intérêt  réel pour le Cap-Vert , destination exotique mais coûteuse pour y parvenir à leurs yeux  et où ils n'ont pas les copains .......
 
Il est étrange qu'après plus de 40 ans de présence sur notre territoire, les épouses de Thomas et d'Antonio s'expriment aussi difficilement  en Français . Comment des titres de séjour et des papiers peuvent ils être délivrés à des personnes n'ayant pas satisfait à de stricts examens concernant la pratique de notre langue ? Loin de moi l'idée de jeter la pierre aux personnes, mais la question sous jacente d'organisation collective  de l'apprentissage de notre langue et son caractère contraignant mérite d'être clairement posée . En effet, parler une langue , c'est aussi s'imprégner des modes de pensée de l'univers  culturel nouveau  dans lequel   l'immigré doit  trouver une place sociale . Quand allons nous enfin affecter des moyens à la hauteur de ces besoins ? Rétrospectivement on est affolé de voir l'inertie du système politique à se saisir de ces questions simples combien essentielles à l'harmonie du pays,  pourtant déjà parfaitement posées notamment par Charles Pasqua dès 1995 c'est à dire il y a 20 ans !
 
Plus concrêt, pour avoir un repère, une jeune cousine d'Antonio  employée de banque touche 120  euros par mois , une femme de ménage  travaille ici  7 jours / 7 , 12 heures par jour pour 100 euros par mois . Vous imaginez  aisément la richesse relative  d'un retraité français même  ancien smicard au Cap Vert !

Xavier arrive comme prévu le 11 en milieu de nuit . Le voyage , avec escale à Casablanca de 10 heures a été éprouvant . La matinée est mise à profit pour récupérer . Nous faisons plus ample connaissance avec Harald et Cornelia (Catamaran Florimell ) avec qui nous  partageons un bon morceau de thon accompagné de pomme de terre rissolées .... (++++) . Harald a eu la gentillesse de me déposer au quai à 1h30 du matin et venir nous rechercher à 5h00 pour ne pas laisser l'annexe trainer  sur la plage une partie de la nuit ...... même gentils, les Cap Verdiens ont parmi eux des chapardeurs de moteurs ! .

Nous faisons découvrir le village à Xavier l'après midi et sommes invités par un autre cousin d'Antonio . Lui, revient de Suisse où il a travaillé 40 ans  à Lausanne ; il est fier de nous faire visiter sa nouvelle maison flambant neuve qu'il vient de faire construire pour 45000 euros (le terrain lui appartenait déjà)  . Nous sommes invités le lendemain midi à la pendaison de la crémaillière avec toute la famille . C'est vraiment  sympa .

Le diable se cachant toujours dans les détails dit on , la météo va nous modifier nos plans . Etabli au Nord Est, le vent doit passer plusieurs jours secteur Nord à  partir de dimanche  , c'est à dire presque exactement en face de là où notre route doit nous conduire pour rejoindre Mindelo sur l'île de Sao Vicente . Nous décidons de partir le samedi matin pour rejoindre Sao Nicolau avant Dimanche midi . Nous joignons Antonio par téléphone  pour lui expliquer . Qui n'est pas navigateur ne peut bien comprendre ces contraintes ; dommage de ne pas avoir fait le tour de l'île avec lui comme il nous a proposé  . Normalement nous repasserons au Cap Vert en fin d''automne 2016 en revenant de St Pierre avant de traverser pour le Brésil   alors rien n'est perdu .....

La navigation vers Sao Nicolau s'est  bien passée  avec un bon vent  de 20 knts au près tribord amure ; nous sommes partis à 9h00 après avoir remis l'annexe à poste sur le roof ; nous arrivons au terme d'une petite navigation de 91 nautiques sur un seul bord à 20h30 .

suite au prochain numéro ......







2 commentaires:

  1. hi louis, hi nicole! ...it was realy funny with you and we liked to spend time with you... hope to see you somewhere in the world again!
    cornelia & harald

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    1. Hello Harald , Hdllo Cornelia
      Yes it was great pleasure to meet you on board and visit Ribéra Brava
      Next year in Brazil , we will meet us again !

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