mardi 24 décembre 2013

Le Cap Vert : Découverte de Sao Vicente : un bonheur paradoxal et joyeux noël pour tous !

Nous sommes depuis une semaine au mouillage dans la baie de Mindelo  sur l'Ile de Sao Vicente  . 
 
 
Nous avons sympathisé avec plusieurs couples de navigateurs autour de nous  . L'ambiance est bon enfant . La baie est animée de jour comme de nuit par le ballet formé par le va et vient des annexes ....  Nous n'hésitons pas à nous porter assistance mutuelle lorsque un moteur est récalcitrant ou à l'occasion d'une panne d'essence . Franck (voilier Brigantin) me montre comment faire de la mécanique expéditive .... un petit coup  sec avec un marteau  sur le carburateur pour décoincer le  pointeau ..... et ça marche !  Ca ne nous empêchera pas d'avoir à  tout démonter ensuite pour régler le problème au fond ... mais l'essentiel est d'être dépanné, de ne pas avoir à rentrer au bateau contre le vent et surtout un clapot suffisamment fort  pour entraver la progression à la rame .

Nous avons essuyé une petite dépression avec un peu de pluie mercredi et jeudi  et permanence d'un temps brumeux  . Il était impossible de voir les iles environnantes  quand ce n'était pas les sommets de Sao Vicente "même"  (l'expression est pour nos amis brestois qui ne manquerons pas d'y voir un clin d'œil)
 
 

Coté température, c'est pas mal  : le jour 25 , la nuit 22 ; les alizées s'étant établies, le vent est constamment de l'ordre de 15 / 20  kns (30 à 40  Km/h environ) . Cette brise  parvient à estomper un peu la sensation d'humidité qui monte en milieu de journée au zénith du soleil .

Je dis ça comme ça ! :  Ce n'est pas pour vous faire râler- vous - lecteurs attentifs et envieux au coin de votre cheminée, cassant la glace  le matin ou déneigeant devant le garage .....(Attention, tenez vous  bien : j'ai des noms !)  mais ici on supporte une petite laine le soir  lorsque nous allons écouter le concert offert par les vedettes cap verdiennes à l'occasion des fêtes de Noël et d'une célébration de la mémoire de Césaria Evora  - la diva de l'ile - .  

Avec l'âge, nous  devenons fragiles et des être sensibles ......  comme quoi, le Cap Vert, serait peut être une meilleure destination pour  monter  une maison de retraite !  

Avant de vous mettre  sur cet  article du blog plus d'illustrations  photos , je dois une brève présentation de l'archipel à ceux qui ne connaitraient pas la géographie de l'Afrique de l'Ouest :

Le Cap Vert est constitué de 9 iles d'origine volcanique, plantées au milieu de l'atlantique, à  250 / 300 miles à l'Ouest du Sénégal (500 kms au large  de DAKAR  pour faire simple) . Il y deux sous ensembles ; les iles "au vent" - situées au nord -; le Barlavento , les iles "sous le vent" - situées au sud : le Sotavento  .   Nous nous situons au 15 ème parallèle (tropique du cancer), toujours   dans l'hémisphère nord  . Nous sommes à la saison sèche (octobre à juillet) avec des vents forts de Nord Est de décembre à mars .  (Pour mieux situer  sur une carte, connectez vous sur l'article "connaitre notre position" et zoomez + :-  sur l'échelle )

La capitale est  Praia sur l'Ile de Santiago .  Le principal problème de l'archipel est le manque d'eau : Ici, nous l' achetons à la marina pour 1,80 € / 100 litres car il serait imprudent de faire fonctionner le déssalinisateur du fait du risque de pollution des eaux de la baie .
 
La population  est de l'ordre de 550 000 habitants dont 35 % de moins de 15 ans .  Le Cap Vert est catholique ; les femmes y  ont un statut social élevé ce qui explique probablement le fort taux de réussite scolaire des enfants et l'explosion du nombre des diplômés de la jeune université .


Les bâtiments de l'université  de Mindelo vus de la passerelle de la marina (à gauche)

L'économie a toutes les caractéristiques d'un système post-colonial : un déficit structurel de la balance des échanges compensé par les flux financiers en provenance de la diaspora, des activités de production  méprisées par les élites qui privilégient la rente de la distribution de produits importés, des services  ou se réfugie la classe moyenne naissante à l'abri d'un syndicalisme sourcilleux générateur de grèves catégorielles  dans les activités stratégiques : transports inter-iles, énergie, eau .... . Le chômage est le corolaire de cette présentation synthétique .... 30%  avec une émigration quasi automatique des jeunes diplômés chèrement formés par l'université .  Là, comme chez nous, même s'il existe une notable différence d'échelle, la faiblesse du secteur secondaire ou tertiaire technique  pèse lourd, car seule capable de fixer des activités créatrices de valeur  pour retenir les compétences formées sur place et équilibrer les échanges économiques  . (cf le livre très intéressant de Joao de Rosario "Cap-Vert : perspectives et réalités " L'Harmattan ).

Ancienne colonie Portuguaise, le Cap Vert est une république  indépendante depuis 1975 . 

Etant arrivés sur l'ile de  Sao Vicente à l'ouest de l'archipel, nous avons décidé de visiter avec soin cette ile et essayé d'en percevoir la singularité . Compte tenu de la faible visibilité résultant d'une brume tenace  nous avons différé la découverte des sites naturels ; nous avons visité la ville de Mindelo , seconde agglomération de l'archipel .

 
l'avenida marginal : elle longe la mer depuis le port de commerce jusqu'à la tour de Belem et les entrepôt de carburant ENACOL .



 
 
 
Une rue du centre ville près du port
 
 
La tour de Belem  (copie de celle de Lisbonne)
 
 
en retrait de la zone touristique .... un lieu de convivialité sur une petite place ombragée près du palais de Justice
 
 
 
 
 L'ile compte 85000 habitants localisés à 80 % dans une ville bien sur entourée de logements de plus en plus précaires plus on s'éloigne du centre . Dans ce dernier, on sent un effort d'embellissement des immeubles avec un début de ravalements qui éclaire la ville de couleurs pétantes .






 
 
 
 
 
 
Les faubourgs sont clairsemés de bâtiments en construction non terminés . Ici, quant on a de l'argent on construit, on s'arrête quand la caisse est vide, on reprend plus tard lorsque le portefeuille le permet .... apparemment ça peut durer  longtemps .....

 

La ville est parcourue dans tous les sens par de petits bus conduits à tombeau ouvert sur des rues pavées avec de la pierre de lave ; ça fait un bruit d'enfer !

 
 
Les liaisons en dehors de la ville vers les villages côtiers sont assurées par des "aliguers", taxis collectifs qui partent  du marché sénégalais vers leurs destinations lorsqu'ils sont complets .... pour patienter des jeunes femmes proposent des beignets ou des fruits pour quelques "escoutchs" (escudos la monnaie locale  1€ =  110 escudos ) .

 
Nicole avec notre chauffeur de l'aliguer vers Salamanza,  Bahia das Gatas et Monteverde
 

Une classe moyenne semble prendre de l'importance comme en témoignent  les constructions de résidences secondaires édifiées à coté de celles des émigrés de la diaspora, tant  à Baïa das gatas  qu'à Calhau   près des grandes plages offrant des spots de surf et de kite réputés .
 
 
 
 
Bahia das gatas  : petit port des pêcheurs
 
 
 
 
La baie de San Pedro près de l'aéroport international Césaria Evora
 
 
Il existe une constellation de petits villages côtiers autour de l'ile, habitées par des pêcheurs . Ils tentent - avec des moyens dérisoires - de survivre aux razzias des bateaux -usine (espagnols et français dans le cadre d'accords européens),  chinois (finançeurs d' infrastructures en contrepartie de cession de droits de pêche) qui surpêchent dans la zone, altèrent  la ressource marine constituant le moyen de subsistance essentiel à la survie de ces populations .    Si ça tourne "bien", ils seront  bientôt tous  agglomérés dans les bidonvilles autour de Mindelo à s'abrutir avec le loto local et la télévision ; si ça tourne "mal" il ne faudra pas s'étonner que les zones de piraterie s'étendent  tout comme en Somalie  dont les côtes ont  été  elles aussi surpêchées .......mais dans les deux cas,  ils auront perdu le principal : leur dignité .




D'un coté de la baie de San Pedro , avec le  village  des pêcheurs   - dont sa  face cachée que les touristes ne fréquentent pas  vraiment sauf s'ils sont curieux ......



de l'autre un ensemble résidentiel pour touristes (au fond de la photo) . Même si le contraste est assez saisissant, il faut reconnaitre que le développement de cette activité semble plutôt bien pensé car les structures hôtelières restent à taille humaine er s'intègrent assez bien dans le paysage . Approche du marché  plutôt qualitative donc ; les encouragements donnés à l'accueil chez l'habitant laissent penser à une volonté de développement d'un  tourisme intégré au tissu local . Les seules solutions "d'élevage hors sol" de touristes que nous avons constatées consistent dans l'amarrage des paquebots de croisière à Mindelo  ; ce sont d'ailleurs elles qui agglomèrent - pour l'essentiel- les comportements de mendicité .

Nous revenons en aliguer à Mindelo  en longeant l'aéroport Césaria Evora  flambant neuf et bien équipé . Les courses en taxi collectif sont bon marché (100 à 150 escoutchs - 0,80 à 1,20 € / personne )

 
La coexistence entre les plaisanciers  et la ville est étonnante  . Deux univers se tangentent  à l'abord de la marina fermée par une grille symbolique   .  D'un coté, le microcosme de la marina  est préoccupé  principalement par la collecte sur internet des fichiers "gribs" permettant de connaitre les prévisions météo offrant "la fenêtre" pour entamer la traversée vers les Antilles d'une part, l'avitaillement d'autre part , de l'autre coté, en ville, la population vaque à ses activité quotidiennes dans une atmosphère déjà bien typée africaine tout en affichant  une créolité  marquée .
 
 
le marché aux poissons : les préparateurs : quelle dextérité !
 
 
 
le coin des joueurs  devant le mer .....
 
 
Il est recommandé de bien faire cuire les aliments !
 
 
 
 
 
Ici le poisson est essentiel et peu cher (2,30 € le kg en moyenne )
 
 
 
 
 
le marché principal ...un lieu très haut en couleurs
 
 
Les gens  au mouillage sont eux  dans un "no man's land" si l'on ose dire .... Ils traversent la marina où l'on peut laisser  son annexe en sécurité au ponton du bar flottant . 
 
 
Le mouillage de Mindelo vu de la ville
 

Les installations  de ce port de plaisance sont bricolées ; à tel point que la petite perturbation du milieu de semaine dernière a occasionné d'assez nombreux dégâts sur les bateaux  . Ce constat permet de se questionner sur  le masochisme des plaisanciers qui - en rang d'oignon sur des cat-ways de fortune  brinquebalés dans tous les sens par un ressac constant - paient un tarif "rochelais" pour n'avoir en pratique  que peu d' eau, souvent pas d'électricité ; cerise sur le gâteau ils ont de la casse et passent des nuits blanches à protéger leur bateau, les pare-battages à la main  .  Au mouillage, c'est confortable, sans dommage et gratuit ....... Heureusement qu'il ne pensent pas à s'abaisser à gonfler leur annexe !

 
le bar flottant de la marina


 

Pour les amis qui ont connu Mindelo avant la marina , l'atmosphère n'est plus la même ; fini le temps des enfants gardiens d'annexes  et des lavandières proposant le service de blanchisserie sur la plage ....Il n'y a plus de "porosité" naturelle entre les plaisanciers et la population  . Au prétexte de sécurité, bon nombre de navigateurs restent cloitrés  derrière la grille, dans ce ghetto  "doré"  sous le regard de quelques jeunes employés tous équipés de tee shirts  floqués d'un "CREW" inepte, les lunettes de soleil posées sur le front ..... Il est à craindre qu'ils perdent  les repères de leur singularité :  Le ridicule des "nègres blancs" à la casquette US vissée à l'envers n'a  donc pas d'avenir  que dans le 9-3, ici aussi semble t'il .

On peut féliciter l'urbaniste concepteur de ce projet d'aménagement  et les élus qui l'on laissé faire  : la citation de  Jean Paul II (sortie de son contexte -je l'avoue) tombe cependant à pic :  " Il y deux types d'hommes : ceux qui construisent  des murs et ceux qui construisent des ponts ".....

Pour avoir arpenté la ville dans tous les sens, y compris dans les quartiers très pauvres, les seules mains  levées vers nous l'on été pour nous dire bonjour ; ici ces simples gens ont encore l'intelligence du cœur et si  l'on raisonne en terme de probabilités, on a  moins de risque d'être agressé ici ..... que sur une aire d'autoroute chez nous !   Bel exemple de dignité dans cette détresse matérielle ostensible .

Les quelques sollicitations  de mendicité   près de la sortie de la marina,  point de passage obligé des touristes, des plaisanciers ou croisiéristes  en escale.....  restent  souriantes ; rien d'agressif n'est perceptible   .
 
Le ciel se mettant de la partie en dégageant la brume, nous en profitons pour aller visiter l'ile notamment gravir le Monte- Verde point culminant de l'Ile à 1800 m d'altitude  .
 
 
 
après une approche en "Aliguer" deux heures de montée - à pied- d'une route pavée dominant des surplombs spectaculaires .
 
 
 
 
C'est le  point culminant  offrant une perspective sur toute l'ile .
 
 
 
Nicole a trouvé sa cabane de berger à restaurer ..... la plage est bien visible ..... mais pas vraiment facile d'accès pour les petits enfants ! ça pourrait le faire en complément du carrelet avec nos amis Robert et Josette !
 
Tout en se promenant dans la journée en dehors, dans le même temps, nous prenons le pouls de la ville et de ses attraits :  Mindelo, c'est de la musique partout : dans les taxi collectifs, dans les magasins,  les cafés, les restaurants .....même dans la rue :
 
 
Nous  occupons nos soirées à aller écouter de la musique cap verdienne : "la casa da morna", le cabaret de Tito Paris, est toute proche du port ; c'en est le haut lieu .  Les vedettes locales s'y produisent trois soirs par semaine : à ne  manquer sous aucun prétexte si l'on passe à Mindelo  : L'orchestre est d'une grande qualité - bonne humeur garantie à prix raisonnable  . Le dernier concert donné dimanche soir  par Mariana Ramos nous a vraiment permis de passer un excellent moment .
 
 
 
Il ne faut pas  être complètement distrait par les charmes de  Mindelo ..... Coté entretien du bateau, nous avons aussi  bien avancé : Franck m'a passé un précieux coup de main pour régler les deux moteurs d'annexe, ranger le Yamaha 15 cv et changer l'impeller . J'ai remis en place le chariot d'écoute de grand voile cassé   ...la préparation pour la traversée vers la Guyanne avance  .
 
 
 
 
 Il restera à caréner la coque car les algues poussent à vue d'œil  : j'ai refait le branchement électrique du narguilée de plongée permettant d'aller nettoyer la coque sans avoir à faire de l'apnée ou d'utiliser des bouteilles lourdes et encombrantes .
 
 
 
 
 
Nous partons le 26 pour Sao Antao, l'ile en face réputée être merveilleuse . Nous rentrerons le 30 pour finaliser la préparation d'Esclarmonde   et faire l'avitaillement pour les 12 à 15 jours de traversée . avec nos nouveaux équipiers pour l'occasion : Antonin et Nina 
N'en disons pas plus pour le moment ..... nous vous les présenterons plus tard  . Suite au prochain numéro  .
Bonnes fêtes de Noël à tous 
Nous vous quittons pour aller réveillonner avec 23 autres navigateurs français sur le port de Mindelo  autour d'un barbecue convivial .
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

























2 commentaires:

  1. beau reportage.... ça donne des envies à Catherine ;-)

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  2. Salut Vincent, Salut Catherine
    ça ne devrait plus tarder pour vous de repasser dans ce coin ....
    bises à l'occasion de la nouvelle année !

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